Rupture du tendon d’Achille : définition
Le tendon d’Achille relie les muscles du mollet (muscle soléaire et muscles gastrocnémiens) à l’os du talon (calcanéum). Ce tendon distal unique, très résistant, joue un rôle essentiel dans le déroulé du pas, aussi bien pour marcher que pour courir, en aidant le pied à se fléchir et à se propulser.
Sa rupture traumatique est toujours totale, elle se rencontre plus fréquemment chez des sujets sportifs vers la quarantaine (course, football, athlétisme…), ou chez des sujets sédentaires et mal entraînés. Mais cette lésion tendineuse peut apparaître en réalité à tout âge, les causes d’une rupture du tendon d’Achille résultant le plus souvent d’une action traumatique. Il s’agit parfois d’un tendon fragilisé par une tendinite, le surpoids, la déshydratation ou la prise de médicaments (corticoïdes, quinolone…).
La déchirure tendineuse provient en général d’un excès de force sur une accélération rapide.
C’est pourquoi la prévention de la rupture du tendon d’Achille passe par une activité physique régulière, associée à un échauffement suffisant. L’objectif est de conserver alors une élasticité optimale des muscles du mollet et de son tendon.
Lors de la rupture du tendon d’Achille, la marche est quasi impossible puis elle peut devenir difficile et plus ou moins douloureuse. Sur une rupture, l’examen clinique avec signe de Thompson positif est en principe suffisant : la pression transversale exercée sur le mollet ne déclenche plus de flexion plantaire sur la cheville. Inversement, l’absence de signe de Thompson positif ne permet pas d’exclure une rupture tendineuse, car le patient peut parfois effectuer une flexion plantaire active, sans résistance, grâce au plantaire grêle.
L’examen clinique est en règle générale suffisant seul ! L’imagerie médicale (échographie ou IRM) permet alors d’affiner en cas de doute.
Schéma anatomique du tendon d’Achille
IRM d’une rupture de tendon d’Achille
Rupture du tendon d’Achille : traitement non chirurgical
Le traitement orthopédique d’une rupture du tendon d’Achille constitue, un choix thérapeutique valide est n’est absolument pas un abandon thérapeutique.
Prise en charge médicale de la rupture partielle du tendon d’Achille
Il s’agit d’une pathologie chronique avec un tableau uniquement douloureux, loin du tableau de rupture traumatique.
Le traitement conservateur d’une rupture partielle du tendon d’Achille s’apparente au traitement des tendinites.
S’il n’existe pas de médicament spécifique soignant la rupture du tendon d’Achille, la prise en charge médicale vise toutefois à calmer la douleur et l’inflammation.
Le traitement conservateur associe alors une rééducation fonctionnelle et le port de talonnettes adaptées, de semelles orthopédiques pour corriger un défaut d’axe de l’arrière pied, d’ondes de chocs et d’étirements.
Prise en charge orthopédique de la rupture totale du tendon d’Achille
Le traitement orthopédique d’une rupture totale repose sur une immobilisation de la cheville dans une botte, sur une période totale de 9 semaines . Le protocole le plus classique associe au moins 3 semaines de botte en équin, avec le pied en pointe, suivies de 3 semaines d’immobilisation du pied à 90°. Ces deux phases précèdent une reprise progressive de l’appui, avec des talonnettes orthopédiques dont on diminue peu à peu la taille.
L’avantage de ce traitement non invasif est d’empêcher toute complication cutanée, au prix toutefois d’un délai de récupération plus long, assorti d’un risque de rerupture plus importante ainsi que d’une perte de force possible.. C’est souvent privilégié chez les sujets fragilisés, comme les diabétiques, ou sur des sujets âgés ou peu sportifs.
Source de l’image : Oped ®
Traitement chirurgical : l’opération du tendon d’Achille
Pour savoir comment traiter une rupture du tendon d’Achille par chirurgie, le praticien doit distinguer les ruptures récentes des lésions anciennes, soit car mal traitées, soit car mal diagnostiquées. Il doit tenir compte de l’intensité des lésions pour choisir la meilleure technique opératoire.
Traitement chirurgical pour la rupture aiguë du tendon d’Achille
Pour les ruptures récentes, le chirurgien de la cheville distingue anatomiquement les ruptures en plein tendon des ruptures en zone myo-tendineuse, situées sur la jonction avec le muscle (enthèse).
Les techniques chirurgicales sont là aussi multiples :
- Chirurgie à ciel ouvert, s’accompagnant de plus de risques de nécrose cutanée et de délai de récupération plus longue, mais moins de rerupture et de perte de force
- Chirurgie percutanée, s’accompagnant de risques de lésions nerveuses, de nécrose cutanée, de rerupture;
- Chirurgie mini-invasive, garantissant une solidité accrue et une récupération plus rapide pour un chirurgien expérimenté (avantage de la de la technique à ciel ouvert associée au mini invasifs pour diminuer le risque de nécrose cutanée et d’infection).
La chirurgie percutanée peut sembler séduisante, car elle garantit une intervention peu invasive, à hospitalisation courte et à cicatrice réduite. La réparation du tendon d’Achille se fait en effet à travers deux petites incisions de quelques millimètres
Le chirurgien introduit à travers la peau un dispositif spécial, type TENOLIG®, composé d’un fil monté sur une aiguille avec harpon. Ce dernier permet, à l’aveugle, de réaliser un ancrage tendineux afin de remettre en contact l’ensemble muscle/tendon.
Pourtant, ce harponnage à l’aveugle souffre de deux inconvénients :
- le geste est forcément moins précis, d’où une remise en tension du tendon moins optimale ;
- le risque existe de toucher des structures vasculaires ou nerveuses, avec des complications pouvant aller dans les cas les plus graves jusqu’à des paralysies localisées du pied.
Chirurgies à ciel ouvert d’une rupture du tendon d’Achille
Chirurgie percutanée d’une rupture du tendon d’Achille
Chirurgie mini-invasive d’une rupture du tendon d’Achille
Source des images : Arthrex ®
C’est pourquoi les chirurgiens expérimentés du pied et de la cheville préfèrent désormais une intervention plus sûre et plus efficace, la chirurgie mini-invasive à ancrage osseux.
Par une incision d’environ 2 cm centrée sur la rupture, puis 2 incisions de moins d’1 cm sur le talon le chirurgien va placer plusieurs ancres osseuses dans l’os du talon, avec plusieurs avantages :
- le geste est très précis, ce qui garantit une remise en tension optimale du tendon après sa rupture ;
- les forces de tension sont mieux réparties avec 2 points d’ancrage, ce qui favorise la stabilité du pied ;
- l’ancrage est plus solide, ce qui explique une récupération fonctionnelle plus complète et plus rapide.
Le chirurgien fore l’os pour y introduire un dispositif d’ancrage bio-compatible et sans danger, qui va s’intégrer à l’os.
Cette chirurgie du tendon mini-invasive apporte une sécurité évidente pour l’opéré avec moins de complications et un résultat fonctionnel optimal, mesurable par dynamomètre sur la force du triceps sural. Des sports comme le football ou le footing peuvent être ainsi repris au même niveau à partir de 8 mois.
Traitement chirurgical de la rupture chronique complète du tendon d’Achille
Face à une rupture ancienne et totale du tendon d’Achille, le chirurgien est généralement confronté à une perte de substance tendineuse liée à la rétraction du tendon, associée à une amyotrophie. Le chirurgien de la cheville dispose alors de différentes techniques pour rapprocher les extrémités et combler la perte de matière.
En général, le rapprochement par réparation directe donne de mauvais résultats, même en l’associant à un allongement en V-Y du tendon pour contrer la rétraction.
Les techniques de greffes type autoplastie par lambeau musculo-aponévrotique (Bosworth), ou autogreffe (gracilis ou semi-tendineux) peuvent quant à elles amener assez fréquemment des complications infectieuses et des nécroses cutanées.
Le traitement de choix reste donc le transfert LFH ou transfert du long fléchisseur de l’hallux. Réalisable sous arthroscopie, on prélève le tendon que l’on transfert en avant du tendon d’Achille sur le calcanéum. Ce transfert LFH permet de récupérer plus vite et avec moins de complications que les autres chirurgies du tendon d’Achille.
Cette technique peut parfois occasionner une petite perte de force de la flexion plantaire sur l’inter phalangienne de l’hallux, mais sans gêne ni inconfort au quotidien.
Autoplastie par lambeau musculo-aponévrotique (Bosworth)
Vidéo du transfert du Long Fléchisseur de l’Hallux (LFH) sous arthroscopie
Transfert du Long Fléchisseur de l’Hallux (LFH)
Source de l’image : Arthrex ®
Traitement chirurgical des ruptures partielles du tendon d’Achille et des entésopathies
Il s’agit de comprendre l’origine de la pathologie. Il peut s’agir d’une rétraction de la chaîne postérieure, d’une position trop “verticale” du calcanéum tirant alors en permanence sur le tendon, ou un défaut d’axe d’arrière-pied.
Il ne faut pas prendre en charge uniquement les conséquences mais surtout les causes de la pathologie.
Le traitement de première intention sera toujours médical. Puis si échec chirurgical.
Plusieurs types de chirurgies sont possibles :
L’allongement du gastrocnémien, la désinsertion réinsertion du tendon d’achille, ou l’ostéotomie de Zadek. Cette dernière, a pour intérêt de ne pas toucher au tendon d’Achille stricto sensus, mais s’attache à changer la conformation du calcanéum pour diminuer les contraintes dessus.
Le chirurgien saura faire la part des choses pour vous indiquer, selon votre cas, celle qui est la plus adaptée à votre cas.
Ostéotomie de Zadek
Rééducation post-opératoire et reprise des activités
L’intervention demande généralement réalisées en ambulatoire, avec port d’une botte amovible. L’appui est possible selon la douleur dans une botte en équin. La prise en charge de la douleur éventuelle est systématique, et adaptée à la sensibilité de chaque patient.
La récupération la plus rapide sur une rupture du tendon d’Achille se voit avec la chirurgie de type mini invasif avec ancrage osseux. L’appui est alors immédiat, avec une botte de marche en léger équin sur 3 semaines.
La récupération progressive avec un pied à 90° se fait au bout de ce délai, la marche dans des baskets étant permise entre 4 et 6 semaines si la position à 90° est atteinte et indolore.
Le traitement après une rupture du tendon d’Achille se poursuit alors avec une rééducation spécifique, si bien qu’il est impossible de dire à l’avance combien de séances de kiné pour rupture tendon d’Achille seront nécessaires au total.
En moyenne, on estime le délai optimal à 3 à 4 mois pour une rupture du tendon d’Achille, avec une durée d’arrêt de travail allant jusqu’à 3 mois selon le métier exercé.
On estime la marche normale possible à la fin du 2ème mois, la reprise du volant et des activités sportives douces (natation, vélo…) au 3ème mois, la reprise des activités sportives intenses (danse, jogging, course) au 6ème mois et le retour aux sports collectifs à 8 mois.
Complications éventuelles de l’opération du tendon d’Achille
Les complications locales parfois rencontrées sont surtout des problèmes de cicatrisation, d’infection (moins de 1% des cas) ou d’hématome.
Les complications vasculaires ou nerveuses se voient principalement sur les chirurgies à ciel ouvert ou la chirurgie percutanée type Tenolig, mais sont possibles quelque soit la chirurgie.
Les raideurs articulaires peuvent apparaître si jamais la rééducation post opératoire n’est pas correctement suivie.
Chirurgie de la rupture du tendon d’Achille : résultats avant / après
Dans le cadre d’une rupture récente où la réparation du tendon d’Achille se fait par ancrage osseux, le taux de cicatrisation tendineuse est de plus de 95%, avec reprise de la marche très rapide (entre 1 mois et 2 mois).
Le risque de rerupture est faible, inférieur à 5%, expliquant que le témoignage pour une rupture du tendon d’Achille traitée par chirurgie soit souvent excellent.
Sur une rupture ancienne, la cicatrisation est plus lente, nécessitant un suivi post opératoire plus soutenu et une reprise plus lente des principales activités.
Mais dans tous les cas, on peut estimer les résultats du traitement chirurgical des ruptures du tendon d’Achille comme excellents, avec une reprise à l’identique des activités sportives dans plus de 90% des cas à terme.
Docteur Marc Elkaïm – chirurgien orthopédiste à Paris, spécialiste du membre inférieur : pied, cheville, hanche, genou.